Le chancre coloré du platane, une menace silencieuse
Le chancre coloré du platane est une maladie fongique agressive qui touche les arbres urbains. Provoquée par Ceratocystis fimbriata f. platani, elle se propage vite et entraîne souvent la mort des platanes, imposant parfois des abattages massifs.

Une maladie redoutable et incurable
Le chancre coloré du platane est une maladie fongique provoquée par Ceratocystis fimbriata f. platani, un champignon microscopique qui s'attaque aux vaisseaux conducteurs de sève de l'arbre. Cette infection, souvent fatale, se propage rapidement et représente une menace majeure pour les populations de platanes, en particulier ceux des alignements urbains.
Sa présence est signalée dans plusieurs régions de France, notamment le long du canal du Midi, où des milliers d'arbres ont dû être abattus pour enrayer la propagation.
Symptômes du chancre coloré
L'infection par Ceratocystis fimbriata f. platani se manifeste par plusieurs symptômes caractéristiques qui permettent d'identifier la maladie avant la mort de l'arbre :
- Flétrissement et jaunissement des feuilles : les feuilles commencent à perdre leur vigueur, se flétrissent et jaunissent de manière précoce;
- Apparition de nécroses sur l'écorce : des taches brunâtres ou noirâtres se développent sur le tronc et les branches;
- Décollement de l'écorce : l'écorce se fissure et se détache progressivement, révélant des zones internes nécrosées;
- Stries bleu violacé sous l'écorce : l'un des signes distinctifs du chancre coloré est la présence de stries bleu violacé visibles lorsqu'on retire une partie de l'écorce;
- Dépérissement rapide : l'arbre peut mourir en quelques mois à peine après l'apparition des premiers symptômes.
Modes de propagation
Le chancre coloré se propage principalement par :
- Les outils de taille contaminés : lors de l'élagage, si les outils ne sont pas désinfectés, ils peuvent transmettre le champignon d'un arbre à l'autre;
- Les blessures mécaniques : les chocs causés par des travaux publics, des tempêtes ou des accrochages avec des véhicules favorisent l'infection;
- Le système racinaire : les platanes plantés en alignement ont souvent des racines entrelacées, facilitant la propagation du champignon d'un individu à l'autre;
- L'eau et les insectes : les spores du champignon peuvent être transportées par l'eau de ruissellement et certains insectes vecteurs.
Moyens de prévention et de lutte
Malheureusement, il n'existe actuellement aucun traitement curatif contre le chancre coloré du platane. La lutte repose donc exclusivement sur la prévention et l'endiguement de la maladie.
Mesures de prévention
- Désinfection systématique des outils d'élagage : avant et après chaque intervention, il est essentiel de nettoyer les outils avec un désinfectant approprié (eau de Javel, alcool à 90°, etc.);
- Protection des arbres contre les blessures : limiter les chocs mécaniques (travaux, véhicules, taille abusive) qui fragilisent les arbres et les rendent plus vulnérables;
- Privilégier la plantation d'espèces résistantes : certaines variétés hybrides de platanes sont à l'étude pour être plus tolérantes à la maladie.
Mesures de lutte
- Abattage des arbres infectés : pour éviter la propagation, les arbres atteints doivent être abattus et leurs déchets brûlés ou éliminés selon les protocoles en vigueur;
- Restriction des tailles inutiles : toute blessure, même mineure, est une porte d'entrée pour le champignon;
- Surveillance accrue des platanes urbains : les collectivités doivent mettre en place des plans de surveillance et d’intervention rapide en cas de détection de la maladie.
Du platane du village au canal du Midi
Le platane commun, arbre ornemental répandu dans les grands jardins, cours, parcs, allées, sites remarquables, existe depuis quatre petits siècles : espèce horticole, hybride du platane d'Occident, Platanus occidentalis, et du platane d'Orient, Platanus orientalis, créée au 17ème, elle a depuis été multipliée essentiellement par bouturage. Des milliers de Platanus x acerifolia, nommé aussi Platanus x hispanica, ont été plantés en France pour leur qualités ornementales, et suivent ainsi le cours du canal de Midi, de l'océan à la méditerranée. Plus exactement suivaient, car depuis quelques années le chancre coloré décime les populations de platane, par milliers.
Ce champignon de la famille des Ascomycètes ne se remarque guère, quelques flammes violacées, bleutées, sur son écorce, et pourtant l'arbre contaminé dépérira dans les 3 à 7 ans. La moindre blessure, même infime, permet à ses spores, minuscules et infiniment nombreuses, de s'introduire et de se propager sous forme de mycélium au sein des vaisseaux de l'arbre, lui coupant son alimentation en sève.
Ce mycélium, fins filaments invisibles, se répand jusqu'au bout des branches, au bout des racines. A l'intérieur même de l'arbre, il produit un nouveau type de spores accélérant encore sa propagation. L'arbre dépérit rapidement, et contamine par de nombreuses voies ses voisins : le Chancre coloré viendra diffuser ses spores à la surface du tronc, des branches, où elles seront dispersées par les insectes, l'eau, le vent, et l'homme. Et cerise sur le gâteau, ou spores sur le mycélium, les racines des platanes communiquent entre elles par des soudures, ou anastomoses, voie royale de transmission pour le champignon parasite, sur des sujets alignés sur des kilomètres, le long de l'eau, autre facteur de propagation. Le chancre coloré peut survivre plusieurs années dans le sol ou les arbres morts.
Une menace pour le patrimoine arboré
Depuis 2011, 22 000 platanes ont été abattus le long du canal du midi, site classé au patrimoine mondial de l'Unesco. Un impact paysager irrémédiable. Et depuis 50 ans, depuis l'arrivée du Chancre coloré dans le port de Marseille, tranquillement installé dans des caisses de transport, 50 000 arbres ont été abattus dans le sud de la France, le long du Rhône.
La propagation s'étend, des moyens sont déployés : réglementation définissant une lutte obligatoire, avec destruction sur place des sujets atteints et de leurs voisin, dans un périmètre de 35 m; informations pour les particuliers, chacun étant vecteur, avec son vélo, ses outils, son panier, sa péniche, de la maladie ; informations pour les professionnels, paysagistes, agents de voirie, jardiniers...
Recherche de variétés résistantes et de diversité
Des recherches de variétés résistantes sont faites, tel le Platanor(R) Vallis clausa, dont la résistance n'est pas totalement attestée. Les majestueuses allées de platane disparues sont désormais remplacées par des micocouliers, des chênes chevelus, des érables... Les générations futures profiteront de l'ombre d'une biodiversité retrouvée.
Des champignons redoutables
Les Ceratocystis sont des champignons redoutables et redoutés dans le monde entier, responsables de pertes importantes dans des domaines agricoles variés :
- Ceratocystis paradoxa : pourriture noire de l'ananas
- Ceratocystis cacaofunesta : phytopathogène responsable de la flétrissure du cacaoyer
- Ceratocystis coerulescens : dépérissement des érables à sucre
- Ceratocystis corymbiicola phytopathogène sur eucalyptus
- Ceratocystis fagacearum ou Bretziella fagacearum : phytopathogène responsable de la flétrissure du chêne
- Ceratocystis fimbriata : pourriture noire de la patate douce, de l'hevea ..parmi une cinquantaine de Ceratocystis
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