Les révolutions vertes ou comprendre la nature, de l'exploitation à la découverte de l'agriculture

Comprendre les révolutions vertes et leur impact sur la Nature pourra peut-être permettre de rectifier le tir pendant qu'il en est encore temps !

Comprendre les révolutions vertes et leur impact sur la Nature
Comprendre les révolutions vertes et leur impact sur la Nature © Au Jardin

Depuis la sédentarisation des populations au néolithique et les premiers pas de l'agriculture, la vision des choses a bien changé. De la simple production de plantes vivrières pour la communauté, nous sommes passés à un système industrialisé avec des répercussions inattendues sur les sols.

Comprendre les révolutions vertes et leur impact sur la Nature pourra peut-être permettre de rectifier le tir pendant qu'il en est encore temps !

Évolution des pratiques liées à l'agriculture au fil des siècles

Pour bien comprendre les modifications dans les pratiques de l'agriculture, nous devons passer par une approche sociétale.

La lutte contre la famine

La base : se nourrir et trouver une parade aux famines. Légitime, cette cause a permis d'évoluer peu à peu dans la sélection de végétaux et de cultiver une grande variété d'espèces botaniques de chaque famille de plantes, mais aussi, de comprendre qu'il était intéressant de planter certains végétaux ensembles. Pour exemple, la technique des 3 sœurs selon laquelle le maïs servait de support aux haricots qui offraient à leurs pieds de l'azote assimilable, et des courges qui assuraient un paillage naturel et protégeaient ainsi le sol de l'évaporation.

Jusque-là tout allait à peu près bien, les paysans cultivaient leur champs dans un but nourricier pour une population locale avec des semences reproductibles.

La révolution industrielle

C'était sans compter sur les débuts de la mondialisation, rendue possible grâce à la révolution industrielle, la démocratisation des engins à moteur et le développement des transports.

Au XIXe siècle, les grandes plantations de thé et de cannes à sucre ouvrent une ère nouvelle, où les richesses des pays lointains peuvent être exploitées sans vergogne.

La toute-puissante chimie

Mais ce n'est qu'au milieu du XXᵉ siècle que les choses vont sérieusement se corser pour la nature et la biodiversité dont elle regorgeait !

L'énergie fossile est au centre de tout, et les principes de l'agriculture commencent à basculer vers des méthodes intensives avec la création de variétés dites 'à hauts rendements'. Le tout sous couvert de faire cesser les famines une bonne fois pour toutes.

La chimie devient la base de l'agriculture moderne, l'ajout d'engrais azotés réjouit en un premier temps les agriculteurs qui voient leurs récoltes multipliées par 10 ou 20.

Cependant, force est de constater que cet engrais stimule également la pousse des adventices, qui par leur hauteur et leur densité favorisent l'apparition de champignons et servent d'hôtes à de nombreux ravageurs. La réponse est alors sans appel : les herbicides, fongicides et insecticides sont déversés à profusion.

L'agriculture devient intensive, il est possible de cultiver de grands espaces et de multiplier les surfaces de culture par 100 pour un seul agriculteur ; un tournant majeur pour la planète est en train de se mettre en place.

Les semences ne sont plus reproductibles , des variétés spécifiques résistantes aux pesticides ou enrobées elles-mêmes de produits chimiques sont imposées aux agriculteurs sous prétexte de les orienter vers des semences de qualité et adaptées à leurs besoins. À partir de ce moment, semer ses propres graines devient un délit. La perte en biodiversité d'espèces végétales autrefois semées est énorme et de nombreuses espèces cultivées traditionnellement ont été perdues. Les grandes firmes se frottent les mains ! Tout est sous contrôle.

Les terres ne sont plus utilisées au niveau local pour nourrir les populations, mais surtout pour produire des céréales pour l'élevage intensif, du coton pour les diverses industries, etc.

L'exportation devient le maître mot, faisant fi de la souveraineté alimentaire des pays producteurs.

Les déserts verts sont légion, la monoculture, maîtresse absolue. Et la biodiversité dans tout cela ? Elle disparaît de manière plus qu'inquiétante et à tous les niveaux.

Vers la nouvelle révolution verte de labo ?

Au XXIe siècle, une sorte de prise de conscience semble émerger avec un nouvel intérêt pour les pratiques d'agroforesterie, les cultures raisonnées ou bio, mais aussi de la face plus obscure de la biologie synthétique, considérée comme la nouvelle révolution industrielle.

Là, tout se passe en laboratoire : des tissus animaux ou végétaux, mais aussi des micro-organismes sont créés et cultivés en laboratoire à des fins commerciales.

Ainsi, la viande artificielle a fait son apparition, les plantes génétiquement modifiées continuent de progresser, mais aussi la création de solutions pour des biocarburants et de bio matériaux ne cesse d'évoluer.

Impacts sur les sols de ces révolutions industrielles

Le sol depuis une centaine d'années est considéré comme un simple support de culture et non comme une entité vivante faisant partie d'un tout. En effet, une parcelle laissée à nu entre deux cultures et non entourée par des haies, des arbres, des fossés, est vide de biodiversité.

Soumise à l'érosion et au lessivage, elle est en perte de nutriments. D'autant que les nombreux intrants ont finalement épuisé la foisonnante vie qui compose un sol en bonne santé.

En effet, ce sont les milliards d'animaux, d'invertébrés et de micro-organismes présents à la surface et dans le sol qui permettent à une terre d'être fertile. En anéantissant ce processus naturel de transformation de la matière organique en nutriments assimilables par les plantes, nous les avons rendues dépendantes de la chimie.

Les fongicides ont également mis à mal les champignons mycorhiziens essentiels au développement de nombreuses espèces. Sous le sol, bien à l'abri des regards, se produit un petit miracle de la nature nommée : mycorhize. Il s'agit d'une symbiose entre les racines des plantes et des champignons. Cette relation est gagnante pour les deux parties : les champignons étant incapables de photosynthèse, ils délèguent l'affaire aux plantes qui les nourrissent de sucres issus de ce procédé. En échange, ils forment une extension autour du système racinaire des plantes, leur permettant de trouver plus de nutriments, dont de l'azote et du phosphore essentiels à leur croissance et à leur développement.

Les plantes mycorhizées poussent plus vite, sont plus résistantes aux conditions climatiques, sont moins sensibles aux ravageurs et aux maladies ! La Nature avait donc déjà prévu ce que les créateurs d'OGM tentent de promouvoir avec leurs semences en nous faisant oublier qu'un procédé naturel et ultra performant existait depuis des millénaires.

Les pratiques d'agricultures intensives et la chimie qui lui est associée sont venues à bout de la vie du sol, qui devenu infertile, a besoin de toujours plus d'intrants.

Les diverses symbioses ont été rompues, les oiseaux et les insectes auxiliaires qui se nourrissaient des ravageurs ont été éloignés des cultures, et ont été très impactés durant les précédentes décennies par les activités humaines.

En trente ans, c'est près de 80 % des insectes qui ont disparu, selon une étude allemande, et un tiers des oiseaux selon une autre étude menée par le CNRS et le Muséum d’Histoire naturelle.

Comment inverser cette terrible tendance ?

Pour réhabiliter la vie des sols, il n'y a qu'une solution : connaître leur biologie et leurs fonctionnements et en tirer les conclusions nécessaires.

Couvrir le sol avec des engrais verts qui vont lui apporter des nutriments et aider à sa structure et son aération, pailler avec des amendements organiques qui vont stimuler la vie du sol, ne plus le labourer, et stopper les produits chimiques, serait déjà un énorme pas vers une remise en vie de la terre. Le retour vers l'agroforesterie offre également quelques espoirs.

Évidemment, cela demande une déconstruction d'un état d'esprit et d'un parti pris depuis bientôt une centaine d'années.

Le consommateur, qui demeure une clé du business-plan mondial, peut par ses achats, aider à se tourner vers un élevage et une agriculture plus respectueux de la vie. Si la demande commerciale va vers des produits bio, locaux, de saison, et vers des animaux issus d'élevages à petite échelle, en pleine nature, la tendance pourrait doucement s'inverser. Mais, c'est sans compter sur la biologie synthétique qui nous réserve bien des surprises !

Article rédigé par Iris MAKOTO

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